Vous avez l’intention d’héberger des réfugiés ukrainiens. Comment cela va-t-il se passer? Quelles sont les formalités à remplir et les implications pratiques?

L’ECHO Muriel Michel 22 mars 2022 

De très nombreux Belges sont disposés à ouvrir les portes de leur maison à des réfugiés ukrainiens. Mais comment cela se passe-t-il en pratique? Quelles sont les formalités à remplir? Les prestations à assurer? Les garanties à fournir? Bref, quelles sont les implications de l’accueil de réfugiés au sein de votre foyer?

L’attestation de protection temporaire: LE sésame du réfugié

Les réfugiés ukrainiens qui souhaitent obtenir une protection temporaire, sésame indispensable pour organiser les différents aspects de leur séjour en Belgique, doivent s’enregistrer à Bruxelles (au Heysel). L’attestation de protection temporaire qui leur est délivrée à l’issue de la procédure leur permet de demander une carte « A. Séjour limité » auprès de la commune, valable un an, renouvelable.

Ils sont alors autorisés à:

• travailler
• s’inscrire à la mutuelle
• accéder aux services du CPAS (notamment pour recevoir le revenu d’intégration)
• accéder à l’enseignement.
• Beaucoup de réfugiés sont arrivés avec leurs animaux domestiques, qui peuvent bénéficier de soins, d’accessoires et de tests gratuits dans six dispensaires du pays (Fondation Prince Laurent).

Comment s’organise l’hébergement?

Les réfugiés ukrainiens qui n’ont pas de solution d’accueil en Belgique chez des amis ou dans leur famille sont orientés par Fedasil vers un logement proposé par les communes.

Vous souhaitez offrir un hébergement? Le Centre national de crise a chargé les communes de recenser les possibilités d’hébergement provisoire disponibles sur leur territoire. Si vous souhaitez accueillir des réfugiés chez vous, vous devez vous inscrire en remplissant un formulaire en ligne ou sur place, à votre commune.

Quelles sont les conditions à remplir et les précisions à apporter? Via le formulaire, outre vos coordonnées personnelles, vous devrez communiquer une série d’informations. Par exemple (les questions peuvent varier, NDLR):
– le nombre de réfugiés que vous souhaitez accueillir
– la durée de l’hébergement
– la possibilité de proposer des repas
– le nombre de chambres que vous mettez à disposition
– s’il s’agit d’un logement chez l’habitant ou séparé
– si vous autorisez la présence d’animaux domestiques
– unedescription succincte de l’espace mis à disposition
– si vous voulez accueillir uniquement des femmes, des adultes, des familles, des non-fumeurs.

La commune procèdera à des vérifications pour éviter toute intention malveillante (prostitution, trafic des êtres humains) et pour s’assurer que les logements proposés sont adaptés.  

C’est le centre de crise national qui transmet les offres de places des citoyens (lorsqu’elles ont été vérifiées) à Fedasil qui fera le « matching » et contactera les hébergeurs.

Aurez-vous droit à une indemnité?

En Pologne, les familles d’accueil recevront 8 euros par jour et par personne. Les Britanniques qui mettent leur logement à la disposition des Ukrainiens (pendant au moins 6 mois) peuvent eux bénéficier de 350 livres par mois, soit environ 418 euros.
En Belgique, une décision à ce sujet est du ressort des Régions.

« En Région bruxelloise, rien n’a encore été décidé, mais nous examinons des pistes« , précise Zeynep Belci, la porte-parole du ministre président Rudy Vervoort, ajoutant que « pour l’instant, les Ukrainiens ont droit au salaire d’intégration via le gouvernement fédéral ». La Wallonie a de son côté adopté sa stratégie d’accueil et de logement, mais il n’est pas (encore) question d’une indemnité (lire encadré).

LA STRATÉGIE D’ACCUEIL WALLONNE

Le Gouvernement wallon a adopté mardi sa stratégie en matière d’accueil et de logement des ressortissants ukrainiens. Une cellule de coordination a été mise en place. Le site www.wallonie.be/Ukraine centralise les informations relatives à l’accueil et le numéro 1718 est à disposition des citoyens qui ont des questions à ce sujet.

La plateforme « Solidarité Ukraine », lancée par la Wallonie pour recueillir les propositions d’hébergement émanant de la population, a déjà permis de recenser près de 1.000 offres grâce auxquelles environ 2.000 personnes peuvent être hébergées. Les informations à fournir dans l’annonce sont assez similaires: localisation du bien, type d’habitation, durée de mise à disposition, nombre de chambres, meublé ou non, accès PMR, animaux acceptés ou non, jardin éventuel et description succincte.

Cette offre complète les 16.000 places d’hébergement proposées en Wallonie au niveau fédéral, via le « housing tool ». Ces hébergements ne sont pas tous immédiatement disponibles, certains nécessitant d’être meublés ou faire l’objet d’aménagements/rénovation, précise le communiqué du gouvernement.

Afin de stimuler et d’organiser l’accueil et de lui permettre de s’inscrire dans la durée, le gouvernement wallon a également décidé:

• La rédaction d’une charte de l’accueillant permettant d’établir des principes de vie en commun auxquels l’hébergeur s’engage à adhérer. Il devra en remettre une copie signée à la commune.
• La possibilité, pour l’hébergeur (propriétaire ou locataire) de convenir avec le réfugié d’une contribution équivalente à 20% du montant de l’aide sociale ou d’un autre revenu perçu.
• La passation d’un marché public d’assurance visant à couvrir les dégâts locatifs qui seraient dus à la présence de personnes additionnelles au sein du logement, pour éviter que l’hébergeur soit sollicité financièrement.
• Travailler et organiser avec les bourgmestres, communes et les CPAS les modalités de visite visant à s’assurer du caractère adéquat des offres de logement.

Maison, RC, voiture: les réfugiés sont-ils assurés?

« Si vous hébergez des réfugiés pour une courte ou une longue période, ces habitants temporaires seront couverts par votre assurance familiale et/ou incendie ainsi que votre assurance auto », explique Assuralia, qui donne les précisions suivantes:

• Un réfugié cause involontairement des dommages à un tiers? Votre assurance familiale indemnisera la victime.
• De la même façon, l’assureur interviendra si l’habitant temporaire cause dans votre habitation des dommages involontaires qui sont couverts par l’assurance incendie (vitre cassée, incendie, inondation due à un robinet non fermé).
• Vous conduisez les enfants d’une famille de réfugiés à l’école? Ils seront également couverts dans le cadre de votre assurance auto. Vous autorisez l’un de vos hôtes à rouler occasionnellement avec votre voiture? Pour autant qu’il dispose d’un permis de conduire valable, il sera couvert.

Ai-je droit à un congé pour m’occuper des réfugiés?

« Il n’existe pas de droit à un congé spécifique pour l’accueil de réfugiés. Un travailleur peut donc utiliser les possibilités existantes: prendre un jour de vacances classique, demander à récupérer des heures supplémentaires ou négocier un congé sans solde avec son employeur », explique Olivier Marcq, juriste au Centre de connaissances d’Acerta.

« Un employeur pourrait décider d’accorder à ses travailleurs des congés supplémentaires ou des absences autorisées rémunérées pour faire du bénévolat ou accueillir des réfugiés. Je conseillerais dans ce cas de fixer par écrit les règles et limites qui encadreraient ce type d’absence », ajoute l’expert RH.

L’Onem a assoupli ses formalités et les conséquences d’un travail bénévole ou de l’accueil de réfugiés pour les chômeurs et les personnes en crédit temps, pour la période comprise entre le 24 février 2022 et le 28 février 2023 inclus.

• L’accueil des réfugiés ukrainiens n’a pas d’influence sur la situation familiale du chômeur ou du travailleur en interruption de carrière ou en crédit-temps, ni sur le droit aux allocations d’interruption. Un formulaire de déclaration spécifique devra toutefois être rempli.
• Les chômeurs complets et les chômeurs temporaires sont dispensés de déclarer les activités bénévoles qu’ils effectuent (conformément à la loi du 03 juillet 2005 sur les droits des volontaires) dans le cadre de l’aide apportée à l’Ukraine et aux réfugiés.

Source: L’Echo