Pourquoi les primes d’assurance incendie augmentent autant

Le Soir, 28/07/2022, p. 5
Clara Grégoire (st.)
Il n’y a pas que le coût de l’énergie qui s’est envolé ces derniers mois. Partout en Belgique, les primes d’assurance incendie augmentent. En cause : la multiplication des sinistres, mais surtout la forte hausse de l’indice Abex. Ce dernier compile l’évolution du coût de la construction. Calculé deux fois par an par l’Association belge des experts (Abex), il prend en compte le prix des matériaux de construction et le coût de la main-d’œuvre.
Or, avec la pandémie, la guerre en Ukraine et les problèmes d’approvisionnement, le coût des matériaux de construction s’est envolé ces derniers mois. La main-d’œuvre, elle, se fait de plus en plus rare. Résultat : entre juillet 2021 et juillet 2022, l’indice Abex est passé de 878 à 954. Soit une hausse de 8,6 %.
Dans l’intérêt des assurés
Si chaque compagnie d’assurances est libre de répercuter ou non cette indexation, « l’application de l’indice Abex est comprise dans la très, très grande majorité des contrats d’assurance incendie », reconnaît Nevert Degirmenci, responsable de la communication chez Assuralia, la Fédération des assurances. C’est notamment le cas chez AG Insurance, qui suit l’indice Abex « avant tout dans l’intérêt des assurés ». « Si on ne suit pas la hausse, on ne peut pas donner la certitude à notre client qu’il aura l’argent nécessaire pour assurer une reconstruction à neuf en cas de sinistre », explique la porte-parole de la compagnie, Laurence Gijs. L’indice Abex « sert donc avant tout à indexer le montant d’indemnité », insiste Alain Coppe, président de l’Abex.
Le Belge peut d’ailleurs se rassurer : l’indice devrait se stabiliser dans les mois prochains. « On a connu cette hausse anormale du coût des matériaux, mais je pense que ça devrait se tasser », affirme Alain Coppe, tout en rappelant que cela dépendra énormément de la situation internationale.
L’envolée de l’indice Abex n’est en outre pas la seule explication à la hausse des primes d’assurance incendie. Une autre, moins importante, réside dans la multiplication du nombre de sinistres. « Avec les catastrophes climatiques, le nombre d’incidents s’accroît d’année en année », confirme Laurence Gijs. Face aux risques, AG a décidé d’appliquer une hausse tarifaire annuelle de 7,1 % en moyenne dès le 1 er janvier 2022. Elle comprend l’indice Abex (5,6 % à l’époque), mais également une hausse additionnelle (1,5 % en moyenne) afin d’anticiper la hausse des sinistres. Lorsque les tempêtes Eunice et Franklin ont balayé la Belgique en février, le leader du marché a fait face à plusieurs dizaines de milliers de demandes d’indemnisation.
Les assureurs
face au défi climatique
L’augmentation de la fréquence des intempéries pourrait bien rebattre les cartes du secteur de l’assurance. Selon une étude publiée en septembre 2021 par Swiss Re, un des principaux réassureurs mondiaux, les primes dans la réassurance « dommages » devraient plus que doubler au niveau mondial d’ici 2040. En cause : le changement climatique et l’urbanisation croissante.
Pour faire face aux risques accrus liés au climat, le secteur des assurances plaide pour un partenariat avec les autorités publiques. « Grâce à une meilleure répartition de la prise en charge des sinistres ainsi qu’un investissement dans la prévention des risques, on aimerait mieux couvrir les conséquences des catastrophes naturelles, et plus durablement », explique Assuralia. A l’avenir, « le tout sera de trouver un équilibre », affirme Laurence Gijs. « En tant qu’assureur, c’est aussi notre rôle sociétal de faire en sorte que les risques restent assurables. »